L'éducation classique à la lumière de Charlotte Mason

Lors de mon précédent article, j'ai cherché à vous introduire le principe d'une éducation classique, appelée aussi éducation libérale, dans le courant moderne. Le discours de Dorothy Sayers offre seulement des pistes et n'est pas un guide que l'on peut suivre pas à pas. Après avoir lu et réfléchi à ce texte, je me suis donc penchée sur le livre de Karen Glass "Consider This" où l'auteur nous amène à réfléchir en quoi la philosophie de Miss Mason s'inscrit dans ce courant éducatif, tout en différant sur certains points pratiques et d'applications. 
Comme j'ai essayé de vous emmener pas à pas dans la découverte du discours de Mme Sayers, je vais tenter de faire de même pour cet ouvrage. Bien sûr, il est bien mieux de lire le livre directement, mais celui-ci n'est accessible que pour les anglophones malheureusement. 



Les premiers chapitres de l'ouvrage de Karen Glass s'emploient à définir le but d'une éducation quelle qu'elle soit, à la lumière de la tradition classique et de la philosophie de Miss Mason. Ces chapitres sont réellement fondateurs,  car comprendre le but ultime d'une éducation, c'est bien sûr saisir l'essence de la pédagogie de Charlotte Mason, mais surtout comprendre ce vers quoi nous devons chercher à tendre tout au long de notre vie. Car dans son livre Karen Glass, comme Charlotte Mason dans ses écrits, ne parle pas de l'éducation en tant qu'instruction donnée à un enfant de 6 à 18 ans, mais bien d'une manière de vivre tout au long de notre existence. Cette philosophie de vie, à travers l'instruction que nous donnons à nos enfants pendants ces précieuses années, doit tendre vers un unique but: leur donner envie de s'éduquer tout au long de leur vie.

Je vais donc tout d'abord aborder ces chapitres plus théoriques, pour passer ensuite à la partie plus "pratique" du livre.

1. Où la théorie éducative dans la tradition classique et la pédagogie Charlotte Mason se rencontrent:
Karen Glass nous explique donc que le but de l'éducation n'est pas l'assimilation de faits ou la rétention d'informations, mais bien l'habituation de l'esprit et du corps à user de sa volonté et agir en concordance avec ce qu'il sait et qu'il a appris. Le postulat que l'éducation se centre autour de l'idée de faire ce qui est juste, plutôt que de simplement retenir des informations, est à la base de la tradition classique. Notre savoir se transforme en action, qui devient elle même vertu et c'est cette vertu qui était le but ultime des éducateurs du mouvement classique.
Voilà bien un mot difficile à entendre pour nous français, fils et filles de Descartes, fiers représentants d'une république fondamentalement laïque, et descendants d'une longue tradition scientifique. Dans la tradition classique, l'éducation n'était pas scientifique, dans le sens où la recherche de la beauté, de la bonté et de la vérite était en son centre, et non la compilation d'information objective. Le terme vérité ici est à entendre au sens moral et, dans la plupart des textes, bibliques. De même, ce mot "vertu" est toujours exprimé dans le sens de la vertu chrétienne dans la tradition classique. Dans notre pays laïque ce sont des termes plutôt politiquement incorrect irais-je jusqu'à dire, et pourtant nous pouvons nous enrichir de ces pédagogies que nous soyons chrétiens ou pas. La vertu chrétienne peut être entendue au sens d'une moralité et d'un désir de justice élevé. Toutefois il est important d'entendre ici que la tradition classique ainsi que Charlotte Mason placent des valeurs subjectives en leur centre et non objectives, à la différence, pour citer un exemple, de la pédagogie Montessori qui est une pédagogie scientifique. Le but de cette dernière est de former l'intellect de l'enfant, à la différence de la tradition classique et de Charlotte Mason, qui elles aussi forment l'intellect mais dans le but d'informer la conduite morale et citoyenne de nos enfants. La formation à la citoyenneté est d'ailleurs une composante très importante de la pédagogie Charlotte Mason, qui y a consacré le 4e de ses livres "Ourselves", et est bien éloigné de ce qu'un enfant peut voir aujourd'hui en éducation civique à l'école. Ce qui est aujourd'hui appelé "Education Morale et Civique", l'une des composantes des matières d'art et découvertes du programme de l'éducation nationale en école primaire, couvre les règles de vie en société et le fonctionnement de la république. Ce que Charlotte Mason appelait "citoyenneté" couvre les biographies de grands hommes d'états, écrits notamment par Plutarque, dont le but est de permettre à l'enfant de comprendre ces grands hommes, ce qui lui permettra lui aussi d'agir dans le monde comme eux et de tendre vers la pratique de la plus haute morale tout au long de sa vie. Encore une fois, on voit bien la différence entre l'éducation vue comme l'étude de sujets et la collecte d'informations, et l'éducation dont le but n'est autre que d'apprendre à nos enfants à penser et à agir de façon juste dans le monde. Ce que proposent le courant classique et Charlotte Mason est une éducation qui ne se limiterait pas à l'instruction, mais bien à la formation du caractère et de la volonté des individus.



Afin de servir cet objectif, Charlotte Mason et la tradition classique s'appuient sur une vue holistique de l'éducation.

" Je pense, repris-je, que si l'étude de toutes les sciences que nous venons de parcourir aboutit à la découverte des rapports et de la parenté qu'elles ont entre elles, et montre la nature du lien qui les unit, cette étude nous aidera à atteindre le but que nous nous proposons, et notre peine ne sera point perdue; sinon, nous aurons peiné sans profit. "
 Platon, La République

Ce qui importe avant tout pour l'éducateur est de comprendre l'unité de la connaissance. Notre nature humaine nous pousse à rechercher l'unité dans le sens où à chaque minute de notre vie nous cherchons à donner un sens au monde qui nous entoure, et ce en unifiant les différentes informations que nous appréhendons chaque jour. Trouver l'unité c'est trouver le sens et en tout temps l'humanité a été en quête de sens. Ce qu'on appelle ici unité, c'est la relation. Trouver la relation entre la connaissance ancienne et la nouvelle, entre une discipline et une autre, entre l'homme et tout ce qui est, voilà la forme que doit prendre l'éducation de nos enfants. Pour Charlotte Mason l'éducation est la science des relations et en cela elle s'inscrit totalement dans le courant de pensée classique.
De ce fait, lorsque nous décidons de donner ce genre d'éducation à nos enfants il est important de sortir de l'analyse et du sujet (comme je l'expliquais dans mon précédent article ), notamment dans les jeunes années de l'enfant. Il ne faut pas tenter de disséquer une chose avant de l'avoir appréhendée dans son ensemble, c'est à dire avant d'avoir une base solide de compréhension de la place de cette chose dans le monde. Nous devons avoir compris le monde afin de ne pas perdre de vue les relations entre les choses lorsque nous voulons les analyser séparément. Le problème actuellement est que dès qu'un enfant sait lire nous l'emmenons sur la voie de l'analyse et de la pensée critique. Alors que l'éducation est un processus lent, invisible, qui se saisit des relations entre les choses au fil du temps, nous cherchons des raccourcis par l'analyse. Laissons à un enfant le temps d'apprécier la beauté d'un texte, ne lui demandons pas de l'analyser. Laissons le créer une relation avec l'auteur, comprendre de par lui-même, avant de le forcer à utiliser des outils d'analyses scientifiques qui l'éloignent de l'objet de ce texte, objet qui est toujours fondamentalement de créer une relation. Relation entre auteur et lecteur, relation entre enseignant et étudiant, relation entre passé et présent, etc... La partie la moins visible de la connaissance, celle qui est impossible à évaluer ou catégoriser, comme la recherche de la vérité, de la beauté et de la bonté, est perdue lorsque l'on cherche à isoler une information de son contexte éclairé. Le point central de l'éducation classique est de comprendre que c'est l'homme en entier qui expérimente le monde, non pas juste ses yeux et son intellect, mais tout ce qui compose son être, c'est à dire son corps, son esprit et son âme. Et c'est bien cela que nous cherchons à éduquer, former et instruire: l'entièreté de notre enfant, pas simplement son intellect.

2.De la théorie à la pratique éducative:

Dans son discours, Dorothy Sayers explique ce qu'est la phase grammaticale dans une éducation classique (point que je développe ici). Karen Glass elle, va nous permettre de vraiment comprendre ce qu'on appelle Grammaire. Marcus Fabius Quintilianus, un éducateur romain dont les écrits ont servi de pilier rhétorique à la tradition des écoles médiévales, explique que grammaire (un mot d'origine grecque) est l'équivalent de littérature (un mot d'origine latine). "Gram" et "Lith", dans chacune des langues signifie lettre et un homme de lettre est un homme versé dans l'étude des grandes œuvres littéraires. L'apprentissage de la grammaire n'est donc pas de prendre un cahier d'exercices et de s'abrutir  de conjugaisons et d'analyses, mais bien de lire des livres vivants de grande qualité et en grand nombre. Les règles de la prononciation, de la ponctuation, de la place des mots, etc... sont apprises par la lecture de ces œuvres. Ici lire un livre vivant est bien le moyen principal d'éducation, mais le but n'est pas l'apprentissage des règles de grammaire, celles-ci étant simplement le produit secondaire de ces lectures. Bien sûr Charlotte Mason ainsi que les auteurs classiques ne disent pas non plus qu'il ne faut pas faire de grammaire, mais encore une fois qu'elle ne doit pas être mise au centre, qu'il faut s'éloigner du sujet- la grammaire- pour appréhender le tout -la littérature-, pour remettre ces mots dans le contexte actuel.
Quintilianus va encore plus loin et explique que la grammaire ne peut pas être appréhendée de manière complète sans l'étude de la musique, puisque celle-ci nous aide à comprendre les rythmes. De même, poésie et études astronomiques sont liées,  ainsi que grammaire et philosophie.
L'étude de la grammaire commence toujours par celle du langage elle-même. Dans la tradition classique, un accent particulier est mis sur l'étude du latin, mais cette étude se fait dans le seul but de permettre à l'étudiant de lire les textes dans leur langage originel. De nos jours, le latin et le grec ancien paraissent plus superflus quand l'éducation de l'enfant se concentre autour d'auteurs ayant écrits dans nos langues modernes. Mais une éducation holistique qui met en relation les auteurs du passé et ceux du présent doit passer par l'étude d'au moins l'une de ces langues. Attention pourtant, actuellement l'apprentissage du latin est devenu analytique, un exercice d’entraînement à la grammaire et à la traduction. Il nous faut à nouveau sortir de ce paradigme pour explorer le latin quasiment comme une langue vivante, dans le sens où elle nous permet d'entrer en relation directe avec les grands auteurs du passé. Et c'est encore une fois ce qui fait toute la différence entre cette philosophie d'éducation et celle qui prédomine actuellement: on peut lire Homère en l'analysant phrase par phrase et en en faisant un cours de syntaxe, construction grammaticale et traduction; ou nous pouvons lire Homère dans son ensemble, afin d'en appréhender les idées héroïques, la morale et la beauté du texte.

Les outils de l'apprentissage dont nous voulons équiper nos enfants sont ceux-là: tout au long de leur vie chercher la beauté, la bonté et la vérité. Le festin d'idées de Charlotte Mason s'inscrit dans cette philosophie. Celle-ci nous explique que "Dès leur naissance, les enfants sont des personnes" qui ont "un penchant pour le bien comme pour le mal". L'esprit de l'enfant est l'instrument de son éducation, ce n'est pas cette dernière qui produit l'esprit. Les enfants arrivent dans le monde équipés pour digérer la connaissance comme ils le sont pour digérer la nourriture. Ils ont apporté avec eux un appétit intellectuel, le désir pour la connaissance mais aussi et surtout une capacité d'attention illimitée à laquelle semble liée le pouvoir de rétention de cette connaissance, appelé aussi mémoire.
Il serait stupide de vouloir apprendre à un enfant comment digérer la nourriture. De même, l'éducateur ne doit pas apprendre à l'enfant comment digérer l'information (notamment en sélectionnant des sujets). Son seul est unique travail est de fournir à l'enfant une nourriture mentale variée et riche, tout en laissant à l'enfant le soin de la digérer, c'est à dire d'en retirer ce qu'il peut et de l'inscrire en lui-même. Si nous dévouons tout notre temps à enseigner des règles de grammaire, de conjugaison, de construction en faisant l'impasse sur la connaissance réelle,  nous affamons nos enfants intellectuellement.

Afin d'offrir à nos enfants cette connaissance, Charlotte Mason nous explique que nous ne disposons que de trois outils: l'atmosphère de l'environnement, la discipline qui s'ancre dans les habitudes et la présentation d'idées vivantes. Tout le reste n'est, selon elle, pas indispensable. Elle s'inscrit dans un courant qui s'oppose au ludique comme la voie royale de l'éducation. Elle ne décrie pas la présence du jeu dans l'éducation de l'enfant, elle le trouve plutôt souhaitable d'ailleurs, mais elle précise qu'il n'est pas la voie de l'esprit. Elle s'oppose de la même manière aux théories éducatives plaçant le mouvement du corps (motricité fine et globale) au centre. Encore une fois, le mouvement est une éducation nécessaire du corps, mais il n'est pas la voie royale d'une éducation holistique. Seul l'esprit permet d'accéder directement à l'esprit, c'est à dire qu'au centre de l'éducation de l'enfant doit être placée la rencontre directe d'esprit à esprit par le biais des idées. Et pour ce faire, les livres vivants se retrouvent au centre de cette pédagogie.

Dans ce cadre l’atmosphère de l'environnement de l'enfant ne doit pas être  étudiée ou préparée avec soins. La présentation de livres vivants, l'étude de la nature, la réalisation de travaux manuels, l'étude des artistes, musiciens et poètes, etc... créent cette atmosphère. Celle-ci ne doit en aucun cas empêcher l'enfant d'interagir naturellement avec le monde. Tout d'abord parce qu'en étant frotté aux difficultés et aux déceptions, mais aussi aux petits succès de la vie quotidienne, l'enfant reste humble quand à sa place dans le monde, a conscience des éceuils posés par son ignorance, ce qui lui permet de toujours vouloir continuer à apprendre. Ensuite, parce que l'interaction avec le monde par les personnes autour de lui, , le travail, le jeu et l'exercice physique lui donnent cette connaissance synthétique du monde, cette compréhension de la connectivité de toute chose. Enfin, c'est seulement dans cette atmosphère non préparée, mais posée par les différents mediums éducatifs utilisés par le parent, que l'enfant pourra mettre en pratique toutes ces vertus et valeurs qu'il appréhende petit à petit. Il doit partager ses jouets au sein de la fratrie, participer aux tâches ménagères au sein de son foyer, mais aussi aider une personne âgée à déneiger son allée par exemple. Je me dois ici d'ailleurs de souligner l'opposition de cette atmosphère "non préparée" et ancrée dans le monde, à celle de la pédagogie Montessori (dont je me suis largement inspirée pendant les jeunes années de mes enfants et que je ne veux en aucun cas critiquer).  Concernant cette dernière, toutes les tâches d auxquelles participent l'enfant sont analysées, découpées et présentées sur des plateaux. La pratique se fait au nom de la pratique. Par opposition quand un enfant participe à des tâches ménagères au sein du foyer, il le fait pour aider. Le développement de qualités, de savoir-êtres et de vertus sont au centre. La valeur morale sous-tend cette pratique éducative plutôt que l'acquisition de compétences données.
La conclusion que nous pouvons tirer de cela c'est que, bien qu'une partie de l'éducation de l'enfant soit laissée librement formée par cette atmosphère que nous imprégnons chez nous, la formation de bonnes habitudes requiert un effort délibéré.  Les habitudes qui marqueront le plus l'enfant sont celles formées à l'âge le plus tendre selon Quintilianus. Ces habitudes visent à responsabiliser au plus tôt l'enfant, l'aider à comprendre sa place dans le monde (celle d'un citoyen actif pour le bien de tous) et l'amener à développer du respect pour les sources de savoir, ainsi que les personnes qui en sont porteuses. Cette discipline des habitudes aidera l'enfant à appréhender mieux les relations entre les personnes, la nature et toute chose dans l'univers.
Enfin concernant la présentation d'idées vivantes, comme nous l'avons vu précédemment, Charlotte Mason appuyée par les auteurs classiques, nous expliquent qu'une idée ne doit jamais être sortie de son contexte, traitée comme un simple sujet. Dans ce contexte, il est important de présenter à l'enfant un maximum d'idées transmises au moyen d’œuvres artistiques dont la littérature fait partie, mais aussi la poésie, la peinture, la musique, etc... Charlotte Mason nous rappelle que l'esprit se nourrit d'idées et que par conséquent les enfants doivent avoir accès au curriculum le plus généreux possible. Ce sont les idées vivantes et non les informations qui fondent la base de l'éducation que nous donnons à nos enfants.

Concernant le trivium, Charlotte Mason l'applique elle aussi dans sa pédagogie, mais de manière moins fragmentée. La phase grammaticale et la phase didactique semblent s'entremêler. Par la pratique de la narration, l'enfant ne se contente pas de comprendre ce qui lui a été lu, mais aussi de former des idées qui leur sont propres en lien avec le texte. Ce qui reste séparé du reste est bien la phase rhétorique, qui, elle, amène à une analyse. Charlotte Mason souligne, comme dans la tradition classique, que l'analyse et la dissection des idées ne doivent pas être abordées tant que l'idée n'a pas été appréhendée dans son ensemble et en relation avec le monde. Charlotte Mason n'a jamais perdu de vue l'idée que le but ultime de l'éducation est la formation de la vertu et du caractère, ceci par la lecture de livres de grandes qualités et touchant une variété infinie de sujet. Laisser à l'enfant le temps de développer une relation avec ces idées est plus important que de le presser dans une forme d'analyse qui placerait plus de valeurs dans la réussite de tests que dans la formation du caractère de l'enfant.


"Savoir par cœur n'est pas savoir : c'est tenir ce qu'on a donné en garde à sa mémoire. Ce qu'on sait droitement, on en dispose, sans regarder au patron, sans retourner les yeux vers son livre. Fâcheuse suffisance, qu'une suffisance pure livresque !"

Michel de Montaigne
Essais, I, 26, De l'institution des enfants

Dans mon article précédent, je vous expliquais la vision du trivium de Dorothy Sayers qui a amené au courant d'éducation classique moderne. Dans cette vision du trivium, la grammaire prend le sens de règles, de faits ou de vocabulaire. Mais au final Charlotte Mason préfère la vision d'auteurs beaucoup plus anciens comme Montaigne, Erasme, Quintilianus et Platon. Comme elle, pour comprendre ce qu'est une éducation classique nous devons nous pencher sur ces auteurs anciens et ce qu'ils ont à nous apprendre sur l'éducation de nos enfants aujourd'hui. Car ces auteurs ont écrits leurs traités et developpés leurs philosophies avant que la pensée analytique et technique ne vienne à dominer le monde.

Alors bien sûr, j'ai donné à cette partie le nom de "pratique éducative". Vous pourriez pourtant arguer qu'il n'y avait rien de bien pratique à tout cela, que c'était au mieux de la philosophie éducative un peu plus appliquée. Et pourtant, pour construire l'éducation de nos enfants nous avons moins besoin d'exemples pratiques que d'idées motrices qui nous aideront à trouver et appliquer ce qui est juste pour nos enfants et  notre famille, dans son environnement bien précis. En tant qu'éducateur appliquant la pédagogie Charlotte Mason nous devons nous borner à fournir le festin d'idées sur lequel l'esprit de notre enfant pourra se repaître. Dans ce cadre, la seule compétence que nous devons réellement développer est la suivante: être capable d'identifier un livre vivant. Comment  faisons nous cela? Tout simplement en se posant cette unique question: est-il possible d'en faire une narration. La qualité littéraire du texte doit être telle qu'elle peut engager l'esprit dans une conversation avec l'auteur. Car encore une fois, nous ne lisons pas un livre pour simplement acquérir des informations mais pour développer une relation avec les idées qu'il présente. Une fois que l'éducateur a identifié les livres vivants qu'il veut présenter à l'enfant, il doit simplement réfléchir à leur ordonnancement. Si nous gardons l'image du festin, nous ne servirions pas le dessert avant le plat principal. Le parent va ordonner ce banquet d'idées afin que l'enfant puisse construire petit à petit des relations entre les idées qui lui sont offertes. La pédagogie Charlotte Mason n'est donc en aucun cas menée par l'enfant. Oui nous laissons l'enfant libre d'intégrer telle ou telle idée du festin qui lui est présenté, mais c'est bien nous qui planifions ce banquet. Enfin, afin d'éviter l'écueil de l'analyse, l'éducateur doit éviter de poser des questions mais plutôt se reposer sur la narration et l'échange pour que l'enfant puisse faire germer les idées qui l'inspirent en lui. Par cet exercice de narration d'idées prises dans le vaste filet de la connaissance humaine, l'enfant construira une vision du monde holistique, basée sur les relations entre les idées et les hommes. Et c'est bien là la base de la tradition classique ainsi que de celle de la pédagogie Charlotte Mason. 







Commentaires

  1. Merci pour ce nouvel éclairage Nadège. Je me permet juste de dire que les regards croisés Masson Montessori ne sont pas tout à fait justes ici. Pédagogie scientifique ne veut pas seulement dire que le but est de former l'intellect de l'enfant. Pas que...Je t'invite à te plonger dans les écrits "la formation de l'homme" et "Eduquer le potentiel humain" de M.Montessori qui sont très éclairants...

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  2. Merci beaucoup pour ces précisions, j'avoue que la comparaison était assez simpliste et visait juste à souligner le point concernant la pédagogie de Mason. J'ai lu deux livres de Maria Montessori mais ça remonte beaucoup pour moi!!

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